Les inondations sont devenues, au fil des années, un enjeu croissant au Québec. Avec la montée des eaux liée aux changements climatiques, de nombreuses municipalités sont confrontées à des risques de plus en plus fréquents et graves. Afin de mieux protéger les citoyens et d’encadrer l’aménagement du territoire, le gouvernement du Québec modernise actuellement son cadre réglementaire en matière de zones inondables.
Parmi les changements les plus attendus : une refonte complète de la cartographie des zones à risque et l’introduction d’un nouveau système de classification plus précis et visuel. Résultat : de nombreux propriétaires découvrent que leur maison se retrouve désormais dans une zone vulnérable, avec des conséquences bien réelles.
Dans cet article, nous déchiffrons les nouvelles règles en vigueur, les impacts concrets pour les propriétaires et la façon de vérifier si une adresse est concernée.
Zones inondables : qu’est-ce que ça veut dire ?
Une zone inondable est un territoire défini où le risque d’inondation est reconnu comme élevé. Il s’agit généralement de secteurs situés en bordure de cours d’eau, de lacs ou de plans d’eau, qui peuvent être submergés temporairement lors de crues, de fortes pluies ou de la fonte printanière des neiges.
Habiter dans une zone inondable, c’est donc vivre sur un terrain où les probabilités de débordement sont suffisamment importantes pour justifier une surveillance particulière, des restrictions d’usage et, dans bien des cas, des impacts sur la valeur de la propriété ou l’accès à certaines assurances
Un cadre réglementaire en pleine transformation : le Projet de modernisation des zones inondables
Afin de mieux encadrer l’occupation du territoire et de faire face à l’augmentation des événements climatiques extrêmes, le gouvernement du Québec a amorcé une vaste réforme du cadre réglementaire entourant les milieux hydriques. Cette réforme s’inscrit dans le régime transitoire de gestion des zones inondables, des rives et du littoral, piloté par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP).
L’objectif principal : protéger la population, les écosystèmes et les biens immobiliers, tout en assurant un développement du territoire plus résilient face aux aléas naturels. Pour ce faire, le ministère propose un plan de modernisation ambitieux, dont l’adoption officielle est envisagée en automne 2025.
Parmi les changements annoncés :
- L’entrée en vigueur de 3 nouveaux règlements ;
- La modification de 4 règlements existants ;
- L’ajustement de 33 autres textes réglementaires déjà en vigueur ;
- L’introduction d’un nouveau système de classification des zones inondables ;
- Et la mise à jour de la cartographie officielle à l’échelle de la province.
Dans ce qui suit, nous nous attarderons particulièrement aux deux dernières mesures, qui affectent directement les propriétaires concernés.
1. L’introduction d’un nouveau système de classification des zones inondables
Jusqu’à récemment, la classification des zones inondables au Québec reposait uniquement sur la fréquence des inondations. Deux catégories principales étaient utilisées :
- Zone 0-20 ans : considérée à risque élevé, avec une probabilité annuelle d’inondation de 5 %.
- Zone 20-100 ans : considérée à risque faible, avec une probabilité annuelle d’inondation de 1 %.
Ce système, bien qu’utile à l’époque, ne tenait pas compte de plusieurs facteurs essentiels, comme la profondeur des eaux, l’intensité des crues ou la vulnérabilité des constructions existantes.
C’est pourquoi un nouveau système de désignation a été instauré dans le cadre du projet de modernisation. Celui-ci intègre désormais une échelle de risque à quatre niveaux, combinée à un code de couleurs intuitif :
- Zone jaune : faible risque
- Zone orange : risque modéré
- Zone rouge : risque élevé
- Zone rouge foncé : risque très élevé
Cette nouvelle approche vise à fournir une lecture plus complète et plus nuancée du risque, en tenant compte à la fois de la fréquence des inondations et de la gravité potentielle des dommages. Elle permet également une meilleure planification de l’aménagement du territoire, en identifiant plus clairement les zones nécessitant une surveillance accrue ou des restrictions d’usage.
2. La mise à jour de la cartographie officielle à l’échelle de la province
La majorité des cartes des zones inondables n’avaient pas été mises à jour depuis 2016. Avec les nombreuses inondations récentes et les changements climatiques majeurs au Québec, la révision de cette cartographie était essentielle. Selon les cartes préliminaires qui ont été dévoilées récemment, à Montréal, le nombre de zones inondables a doublé.
Il est essentiel de préciser que cette nouvelle carte ne crée pas de nouvelles zones inondables, elle ne fait que les identifier en tenant compte des connaissances scientifiques et données les plus récentes. Malheureusement, du jour au lendemain, de nombreux propriétaires découvrent que leur propriété se situe désormais dans une zone vulnérable.
Quelles sont les répercussions pour les propriétaires désormais en zone à risque ?
La mise à jour de la cartographie des zones inondables ne se limite pas à une simple révision technique : elle a des effets concrets sur la vie de milliers de propriétaires québécois. Voici les principales conséquences auxquelles ils pourraient être confrontés.
Des usages limités, voire interdits, sur certaines propriétés
Les nouvelles cartes influencent directement les schémas d’aménagement des municipalités. En identifiant de nouvelles zones à risque, elles restreignent les usages permis sur ces terrains, notamment en matière de construction, de reconstruction ou de rénovation.
Les zones inondables faisaient déjà l’objet de réglementations spécifiques. Toutefois, avec l’élargissement du territoire à risque, un plus grand nombre de propriétés seront soumises à ces contraintes. De plus, dans le cadre du projet de modernisation, le gouvernement envisage d’introduire un règlement plus strict, qui pourrait :
- Interdire certains types de rénovations majeures ;
- Imposer des conditions supplémentaires à la reconstruction après sinistre ;
- Restreindre les possibilités de développement ou d’agrandissement sur les terrains visés.
Pour les propriétaires, cela signifie moins de flexibilité et plus d’incertitudes quant à l’avenir de leur propriété.
Une couverture d’assurance difficile à obtenir… ou très coûteuse
Beaucoup de propriétaires ignorent encore qu’en assurance habitation, les dommages causés par les inondations ne sont pas automatiquement couverts. Il faut généralement souscrire un avenant spécifique.
Or, avec l’élargissement des zones à risque, les assureurs deviennent plus frileux. Deux scénarios sont désormais fréquents :
- Le propriétaire se voit refuser l’ajout d’une protection contre les inondations, même s’il possède déjà une police d’assurance pour d’autres risques.
- L’avenant est offert, mais à un coût très élevé, parfois prohibitif, en raison du risque jugé trop important.
Dans les deux cas, les propriétaires doivent composer avec une protection limitée et un sentiment d’insécurité financière croissant.
Des obstacles majeurs à l’obtention d’un prêt hypothécaire
Le financement devient un véritable casse-tête pour ceux qui souhaitent vendre ou acheter une propriété en zone inondable. Depuis février 2024, la situation s’est aggravée : Desjardins, l’un des derniers grands prêteurs à accepter ce type de dossiers, a cessé d’émettre des prêts hypothécaires pour les maisons situées en zone à risque élevé.
Il reste théoriquement possible d’obtenir un financement auprès de certaines institutions, cependant :
- Une mise de fonds minimale de 35 % est souvent exigée ;
- Les demandes sont traitées au cas par cas, sans aucune garantie d’approbation.
Résultat : les acheteurs potentiels sont moins nombreux, et les ventes beaucoup plus difficiles à conclure.
Une dépréciation de la valeur foncière
Le gouvernement du Québec estime que l’effet direct de la nouvelle catégorisation des zones inondables entraînera une baisse moyenne de 4 % de la valeur foncière des propriétés concernées.
Dans les faits, plusieurs propriétaires observent déjà une perte de valeur bien plus importante, aggravée par :
- La difficulté de vendre ;
- Le coût élevé des assurances ;
- L’impossibilité d’effectuer certains travaux.
En résumé, une propriété classée en zone à risque devient moins attrayante sur le marché, ce qui peut prolonger le délai de vente et forcer les vendeurs à réduire considérablement leur prix.
Géo-Inondations : où peut-on consulter la nouvelle carte des zones inondables au Québec ? Quand sera-t-elle officiellement disponible ?
La nouvelle carte officielle des zones inondables, élaborée dans le cadre du projet de modernisation du gouvernement du Québec, n’a pas encore été officiellement adoptée. Son entrée en vigueur est prévue à l’automne 2025, sous réserve des consultations et validations en cours.
D’ici là, il est possible de consulter une version interactive actualisée des zones à risque grâce à l’outil Géo-Inondations, mis à disposition par le gouvernement. Cette plateforme permet de visualiser les territoires potentiellement touchés, en fonction des données les plus récentes en hydrologie et en cartographie.
Comment savoir si ma maison ou ma rue est située en zone inondable au Québec ?
Vous vous demandez si votre propriété est concernée par les nouvelles classifications ? Voici plusieurs façons simples et fiables de le vérifier :
- Utiliser la carte interactive Géo-Inondations : rendez-vous sur l’application cartographique du gouvernement et entrez votre adresse, votre code postal ou le nom de votre municipalité. Vous verrez immédiatement si l’endroit est touché par une désignation de zone inondable.
- Contacter votre municipalité : Votre bureau municipal peut vous confirmer si votre maison se trouve dans une zone à risque et vous informer des règlements applicables en matière d’aménagement ou de travaux.
- Vérifier votre certificat de localisation : ce document légal, produit par un arpenteur-géomètre, indique clairement si la propriété est située dans une zone inondable. Attention : pour qu’il soit valide, il doit être à jour.
- Consulter votre contrat d’assurance habitation : certaines polices mentionnent explicitement si votre résidence est exposée à un risque d’inondation ou précisent les conditions pour ajouter une protection supplémentaire.
- Faire appel à un professionnel : en cas de doute, un arpenteur-géomètre peut effectuer une évaluation précise du risque pour votre terrain. Il s’agit d’une option judicieuse si vous envisagez des rénovations, une vente ou un achat immobilier.
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