Que vous le souhaitiez ou non, vos voisins font partie intégrante de votre quotidien. Et parfois, certaines de leurs actions peuvent engendrer des tensions, voire des problématiques de voisinage, qui nuisent à votre tranquillité et à votre qualité de vie.
Votre voisin fait jouer de la musique à plein volume au petit matin ? Il empiète régulièrement sur votre terrain ? Vous avez la désagréable impression qu’il vous observe ? Ces situations peuvent rapidement devenir envahissantes et rendre votre quotidien difficile à supporter.
Heureusement, des recours existent. Le cadre légal provincial définit les droits et obligations de chacun, tandis que les règlements municipaux peuvent préciser certaines règles en fonction des situations. Il est donc possible de faire valoir vos droits et de rétablir un climat de vie paisible.
Qu'est-ce qu'un conflit de voisinage?
Un trouble de voisinage désigne un inconvénient sérieux, anormal et répétitif causé par les agissements, ou l’inaction, d’un voisin. Il est toutefois important de distinguer les désagréments normaux de la vie en communauté des situations véritablement problématiques. Par exemple, le bruit de la tondeuse à gazon un samedi avant-midi peut être agaçant, mais il s’agit d’un inconvénient tolérable auquel chacun doit s’attendre en milieu résidentiel.
Règles de bon voisinage : que dit le Code civil du Québec ?
L’article 976 du Code civil du Québec souligne l’importance de la tolérance dans les relations de voisinage :
« Les voisins doivent accepter les inconvénients normaux du voisinage qui n’excèdent pas les limites de la tolérance qu’ils se doivent, suivant la nature ou la situation de leurs fonds, ou suivant les usages locaux. »
Cette disposition rappelle que la cohabitation entre voisins repose sur un équilibre délicat : chacun doit faire preuve de tolérance envers ce qui est considéré comme « normal » dans son environnement, tout en conservant le droit de jouissance paisible des lieux.
Les voisins: qui sont-ils réellement?
La question peut sembler anodine, mais elle soulève un point essentiel : le trouble de voisinage ne repose pas uniquement sur une question de mitoyenneté, mais plutôt sur la proximité et l’impact réel d’une nuisance. En réalité, la notion de voisin est plus large qu’on pourrait le croire. Un voisin peut être :
- Une entreprise puisque le voisinage n’implique pas nécessairement une personne physique ;
- Toute personne résidant dans la même rue, le même secteur ou le même quartier, même si elle n’est pas directement adjacente à votre propriété.
Quels comportements peuvent constituer des troubles de voisinage ?
Les sources de conflit entre voisins peuvent être multiples et prendre des formes diverses. Lorsqu’un comportement dérangeant cause un inconvénient sérieux, anormal et répété, il peut être considéré comme un trouble de voisinage, justifiant une intervention ou un recours. Voici quelques exemples typiques de situations pouvant être jugées excessives :
- Les bruits excessifs comme de la musique forte, des travaux bruyants en dehors des heures permises ou des aboiements continus ;
- Les arbres, haies, branches ou clôtures qui empiètent sur votre terrain ou nuisent à l’ensoleillement ;
- Le harcèlement, les insultes, l’intimidation ou le manque de civisme d’un voisin ;
- Le passage non autorisé et répétitif sur votre propriété ;
- Les émanations de fumée ou les odeurs persistantes et désagréables, qu’elles proviennent d’un barbecue, d’un foyer extérieur ou de déchets mal gérés ;
- Un éclairage trop intense, notamment lorsqu’il éclaire directement votre résidence pendant la nuit ;
- Les nuisances causées par des animaux de compagnie comme des chiens laissés seuls en permanence ou un manque d’hygiène dans les espaces partagés ;
- Le non-respect de la règlementation municipale, qu’il s’agisse d’horaires de travaux, d’entretien des espaces ou de gestion des déchets.
Ces exemples ne sont pas exhaustifs. Ce qui compte avant tout, c’est l’intensité, la fréquence et les conséquences du comportement en question sur votre qualité de vie. Explorons quelques-unes de ces nuisances.
1. Le bruit excessif : quel horaire à respecter pour éviter les tensions ?
Le bruit est l’un des motifs les plus fréquents de problèmes entre voisins. Musique forte, travaux répétitifs ou conversations bruyantes peuvent nuire à la tranquillité du voisinage. Toutefois, pour qu’un bruit soit considéré comme un trouble anormal, il doit être répétitif, excessif et inadapté au contexte.
Une fête occasionnelle ou un bruit ponctuel n’équivaut pas à un trouble au sens légal. La tolérance fait partie de la vie en collectivité. Avant d’agir, il est conseillé de prendre du recul et de vous poser les bonnes questions :
- Le bruit est-il réellement nuisible de manière continue ? S’agit-il d’un bruit persistant à toute heure du jour et de la nuit ?
- Avez-vous pris en considération l’environnement dans lequel vous vivez ? Le niveau de bruit tolérable dans un milieu agricole, par exemple, n’est pas le même que dans un quartier résidentiel tranquille.
- Se pourrait-il que le problème soit lié à l’insonorisation ? Dans certains cas, une isolation acoustique insuffisante de votre maison peut amplifier la perception du degré de bruit et devenir la cause du problème.
2. Surveillance et intimidation par le voisin : quoi faire face à une atteinte à la vie privée
Le respect de la vie privée est un droit protégé par la Charte des droits et libertés de la personne. Toutefois, certains comportements abusifs de voisins peuvent y porter atteinte.
Le harcèlement, l’intimidation ou tout geste répété et volontaire visant à nuire, comme des appels injustifiés au service de police, peuvent constituer un trouble anormal de voisinage.
De même, si un voisin vous épie, observe vos déplacements ou oriente une caméra de surveillance vers votre propriété, il s’agit d’une atteinte illégitime à votre intimité. Ce type de comportement est intrusif et anxiogène et des mesures peuvent être prises pour y mettre fin.
3. Accès non autorisé et empiétement : quand la limite est franchie
Un voisin ne peut accéder à votre terrain sans votre autorisation, même pour effectuer des travaux. S’il doit, par exemple, procéder à des réparations sur une infrastructure qui lui appartient, mais qui nécessite un passage sur votre lot, il est tenu de vous en informer au préalable, verbalement ou par écrit.
Il est aussi possible que votre propriété soit grevée d’une servitude ou d’un droit de passage légalement établi, qui autorise un voisin à circuler sur une portion de votre terrain. Toutefois, même dans ce cas, cet accès doit se faire dans les limites du raisonnable. Un usage abusif ou détourné peut constituer un trouble de voisinage et faire l’objet d’un recours.
L’empiétement ne se limite pas au passage : il peut aussi concerner des fenêtres non conformes, des arbres ou haies trop proches, des clôtures déplacées ou encore des structures permanentes (remise, balcon, piscine) empiétant sur votre terrain.
Que faire en cas d’empiétement ?
Si vous constatez un empiétement, tentez d’abord un règlement à l’amiable. Selon le cas, vous pouvez :
- Demander une compensation financière ;
- Proposer la vente de la portion de terrain concernée ;
- Exiger la remise en état des lieux.
Quelle que soit la solution choisie, il est essentiel de documenter l’entente par écrit, afin d’éviter tout malentendu ultérieur.
Comment faire cesser un trouble de voisinage ?
Les conflits de voisinage peuvent rapidement s’envenimer s’ils ne sont pas gérés avec diplomatie. C’est pourquoi il est important d’agir avec discernement dès les premiers signes d’un trouble. Plusieurs recours graduels s’offrent à vous, allant de la simple discussion jusqu’à une action en justice, en passant par la mise en demeure.
1. Favoriser la discussion à l’amiable
En premier temps, tentez une approche directe et respectueuse avec votre voisin. Une conversation franche, posée et non accusatoire peut permettre de désamorcer le conflit. Bien souvent, la personne concernée n’est même pas consciente de l’impact de ses gestes sur votre quotidien et de l’inconvénient anormal qu’elle cause.
N’attendez pas que la situation s’aggrave : plus vous intervenez tôt, plus il est facile de préserver une relation de bon voisinage.
2. Recourir à des modes alternatifs de résolution des conflits : la médiation au Québec
Si la discussion n’aboutit pas, vous pouvez vous tourner vers des mécanismes de résolution amiable pour obtenir des conseils juridiques, comme :
- La négociation entre parties ;
- La médiation (avec l’aide d’un médiateur neutre) ;
- La conciliation ;
- Ou encore, dans certains cas, l’arbitrage.
Ces solutions sont souvent moins coûteuses, plus rapides et moins stressantes que les démarches judiciaires. Elles permettent également de maintenir des relations plus harmonieuses à long terme.
3. Envoyer une lettre de mise en demeure pour faire cesser les troubles
Lorsque les démarches amiables échouent, l’étape suivante consiste à faire parvenir à votre voisin une mise en demeure écrite. Cette lettre a pour but :
- D’exposer clairement les faits reprochés ;
- De proposer une solution raisonnable pour mettre fin au trouble ;
- De prévenir des conséquences juridiques en cas d’inaction.
Bien qu’elle ne soit pas toujours obligatoire, la mise en demeure constitue une preuve importante si vous devez ensuite faire appel aux tribunaux. Elle démontre que vous avez tenté de résoudre le différend de façon pacifique.
4. Recours aux tribunaux : la jurisprudence d’un juge en dernier recours
Si aucune solution n’est trouvée et que le trouble persiste malgré vos efforts, vous pouvez intenter un recours devant les tribunaux. Le juge évaluera la situation selon la gravité, la répétition et l’anormalité du trouble, et pourra ordonner :
- L’arrêt immédiat du comportement fautif ;
- Le retrait d’une structure ou d’un aménagement problématique ;
- Ou même l’octroi de dommages-intérêts si vous avez subi un préjudice.
Quel tribunal saisir en cas de trouble de voisinage ?
Au Québec, le tribunal compétent dépend principalement de la valeur du litige et de la nature du recours :
- La Division des petites créances de la Cour du Québec peut être saisie si vous réclamez un montant de moins de 15 000 $ (sans avocat requis) ;
- Pour un montant supérieur à 15 000 $, il faut s’adresser à la Chambre civile de la Cour du Québec ou à la Cour supérieure du Québec, selon le contexte du dossier ;
Comment prouver un trouble anormal de voisinage ?
Si toutes vos démarches amiables demeurent infructueuses et que vous devez porter le conflit devant les tribunaux, il vous faudra fournir des preuves concrètes démontrant l’existence et la gravité du trouble que vous subissez. La charge de la preuve repose sur vous : un dossier bien constitué est donc essentiel pour soutenir votre démarche. Voici les éléments de preuve les plus utiles à rassembler :
- Les échanges écrits avec votre voisin, tels que courriels, lettres ou messages texte, illustrant vos tentatives de résoudre le litige de façon pacifique ;
- Des témoignages de voisins ou de tiers ayant été témoins du comportement reproché ou ayant eux-mêmes été affectés ;
- Des constats d’huissier ou des rapports de police, qui documentent officiellement la situation sur le terrain ;
- Des attestations médicales, s’il est démontré que votre santé physique ou mentale s’est détériorée en lien direct avec le trouble subi.
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