L’année 2023 n’a pas toujours été favorable au marché de l’immobilier. On peut notamment évoquer les répercussions subies par les emprunteurs en raison de la forte hausse des taux d’intérêts de 2022. Du côté des locataires, 2023 n'a pas non plus été une année accommodante.
Plusieurs événements survenus durant l'année écoulée permettent en effet de l'affirmer.
Décryptage.
Augmentation du nombre d’évictions
C’est l’un des faits majeurs de cette année achevée. Le nombre d’évictions forcées a été en forte augmentation à Montréal et au Québec en 2023, par rapport aux années précédentes. Cette tendance a récemment été rapportée en décembre 2023 par les membres du Regroupement des comités logement et association de locataires du Québec (RCLALQ).
Plus concrètement, ce sont près de 3531 cas d’évictions forcées qui ont été constatés durant l’année au Québec. Cela représente une hausse de 132 % dans la province par rapport à 2022, où le chiffre recensé était de 1525. Pour Montréal, la hausse atteint même 143 %*, tandis qu'elle se situe autour de 69 % à Québec. Parmi les autres faits saillants rapportés, on apprend des augmentations généralisées sur tous les types d’évictions :
- Les reprises de logements sont passées de 818 à 1416 entre 2022 et 2023;
- Les évictions, de 230 à 545;
- Les évictions pour rénovictions, de 288 à 949;
- Les pressions indues, de 189 à 630.
Des leviers légaux et illégaux utilisés par les propriétaires
Il faut en effet savoir qu'un propriétaire peut utiliser plusieurs leviers pour mettre à la porte son locataire.
Reprise du logement pour travaux
La reprise de logement est un processus autorisé, mais encadré. Elle intervient lorsqu’un propriétaire souhaite récupérer le logement pour lui-même ou pour un membre de sa famille proche. On note aussi que le Code civil lui accorde un droit de reprise s’il souhaite :
- Agrandir le logement;
- Le subdiviser;
- Changer son affectation.
Si l’augmentation de l’utilisation de ces leviers par le locateur est indéniable, ceux-ci restent toutefois autorisés par la législation.
Les rénovictions
Ce n’est pas le cas de certaines méthodes illégales, également en augmentation au Québec. On peut notamment parler du cas des évictions pour rénovcitions, qui correspondent aux expulsions justifiées par un besoin d’effectuer des travaux majeurs par le propriétaire.
Les pressions indues
L’autre méthode non permise, celle des pressions indues, se veut encore pire. Ici, il s’agit tout simplement d’une forme de harcèlement exercée de la part d’un propriétaire envers son locataire.
Ce n’est pas nécessairement une pression directe, puisque cela peut prendre la forme d’un refus de procéder à des réparations dans le logement lorsque celles-ci s’imposent. Dans ce cas de figure, le locateur laisse alors volontairement l’état du logement se dégrader. Inévitablement, cela contraint le locataire à s’en aller de lui-même au bout d'un certain moment.
Ces évictions illégales ne sont pas encadrées et passent sous le radar du Tribunal administratif du logement (TAL).
Quelles sont les mesures réclamées par le RCLALQ ?
Dans ce contexte, le RCLALQ réclame justement plus de rigueur à ce niveau-là. Ses membres demandent au gouvernement du Québec un changement de législation pour les projets de reprise, d’éviction et de travaux majeurs. Dans un récent communiqué, l'organisme déclare souhaiter que ces projets obtiennent à l'avenir « une autorisation du tribunal » et fassent « l’objet d’un suivi obligatoire dans l’année qui suit ».
Il précise d'ailleurs que la réalité des chiffres évoqués plus haut pourrait être plus élevée. En effet, nombreux sont les cas qui ne font jamais l’objet d’un signalement.
Le projet de loi 31 : vers un retrait du droit des locataires
Porté par la ministre Duranceau, le projet de loi 31 tend à modifier certaines dispositions du Code civil du Québec. Il faut toutefois savoir qu'il est vivement critiqué par certains acteurs du secteur, en raison de plusieurs points qu’il contient jugés discriminants vis-à-vis des locataires.
Modification du système de cession de bail
L’un des principaux points du projet de loi 31 qui fait polémique concerne les modifications qu’il prévoit pour la cession de bail. S’il vient à être adopté, les propriétaires pourront refuser une demande de transfert ou de cession de bail « pour un motif autre qu’un motif sérieux ». Pour cela, ils n'auront de plus pas besoin de passer par le Tribunal administratif du logement (TAL).
Il faut savoir que la cession de bail est une pratique répandue dans le secteur locatif au Québec. Certaines personnes estiment d’ailleurs qu’il s’agit de la principale mesure de contrôle de loyer dont dispose l'occupant d'un logement. Cette modification est ainsi perçue comme un recul du droit des locataires par une partie de la population.
Le cas de la représentation auprès du Tribunal administratif du logement
Un autre point de discorde concerne l'autorisation donnée aux propriétaires de se faire représenter lors d'une audience auprès du TAL. Avec cette modification de représentation permise, les locataires et les propriétaires pourront se faire représenter par des tiers, à frais moindres devant le Tribunal.
Ici encore, cette mesure est perçue comme étant à la défaveur des locataires. Jonathan Carmichael, membre du Bureau d’animation et information logement (BAIL), déclarait récemment dans un article de Monquartier.quebec, qu'avec cette mesure :
« Des entreprises de gestion immobilière se feront payer par des propriétaires immobiliers afin de les représenter au TAL. […] Ceci viendra accroître le déséquilibre actuel en ce qui a trait à l’accès à la justice puisque les locataires, en raison de leurs moyens modestes, ne pourront profiter des mêmes avantages. »
L’absence de certains droits des locataires
En parallèle des mesures à la défaveur des locataires, certains experts pointent justement l'absence d'avancées significatives en leur faveur. Par exemple, le projet de loi n'aborde pas la question du taux élevé de logements insalubres ou l'augmentation des rénovcitions et évictions pour pressions indues. De plus, les loyers continuent d'augmenter rapidement sans qu'aucune législation ne tente de freiner le phénomène.
Quand la loi sera-t-elle promulguée ?
Un temps avait été prévu pour la fin de l'année passée, mais la promulgation du projet de loi n'est finalement pas intervenue, faute de temps. La reprise de la session parlementaire est pour le moment prévue pour le 30 janvier 2024.
Vous l’aurez compris, 2023 n’aura pas particulièrement été à la faveur des locataires. Les travaux demeurent encore importants pour parvenir à un juste équilibre des relations locateur-occupant.
*Chiffres fournis par le RCLALQ
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